La microscopie utilisant des lentilles en verre et de la lumière a été un pilier de la recherche en laboratoire depuis des siècles. Bien qu’il existe des dispositifs plus puissants tels que les microscopes électroniques, leur coût élevé et leurs besoins en entretien les rendent impratiques pour la plupart des laboratoires. En conséquence, les microscopes confocaux, qui utilisent la lumière et des lentilles pour agrandir la taille des objets, sont l’option préférée pour de nombreux chercheurs. Cependant, ces microscopes ont des limitations en termes de résolution des objets proches de la longueur d’onde de la lumière utilisée, ce qui entraîne une distorsion de l’image par diffraction.

Les micro-organismes tels que les bactéries, les champignons et les virus se situent dans cette plage de taille, ce qui présente des défis pour les microbiologistes et les pathologistes qui cherchent à les étudier et à les diagnostiquer. Pour surmonter ces obstacles, la technique de microscopie d’expansion est apparue au cours des huit dernières années, permettant d’améliorer la résolution des microscopes conventionnels en augmentant la taille des micro-organismes observés.

La microscopie d’expansion utilise un hydrogel polyélectrolytique pour dilater les échantillons. Ces gels sont très absorbants et se gonflent lorsqu’on y ajoute de l’eau. Les échantillons, y compris des biomolécules spécifiques telles que des protéines, sont ancrés à cette matrice de gel. À mesure que le gel se gonfle, les échantillons se dilatent jusqu’à quatre fois, éliminant la distorsion causée par la diffraction.

Cependant, la microscopie d’expansion rencontre des difficultés pour assurer une dilatation uniforme des échantillons. La présence de parois cellulaires dans de nombreux micro-organismes entrave la dilatation, en plus de la nécessité d’étapes d’ancrage spécifiques pour chaque biomolécule, ce qui rend le processus fastidieux et restrictif en termes de types d’échantillons pouvant être dilatés.

En juin 2023, une équipe de chercheurs en biotechnologie dirigée par Yongxin Zhao à l’Université Carnegie Mellon a développé une nouvelle plateforme de microscopie d’expansion appelée µMagnify. Cette plateforme utilisait un hydrogel qui lie universellement les biomolécules dans toute la matrice de gel, ce qui permet une dilatation plus uniforme des échantillons et élargit la gamme d’organismes et de tissus pouvant être observés. Cependant, deux défis persistaient : le problème de la paroi cellulaire et la capacité d’étiqueter et d’identifier des structures spécifiques.

Pour aborder le problème de la paroi cellulaire, les chercheurs ont combiné un traitement thermique avec un mélange d’enzymes digestives de paroi cellulaire, permettant une dilatation réussie d’une variété de pathogènes et de tissus infectés, y compris des biofilms bactériens et fongiques robustes.

L’autre défi concerne l’étiquetage des protéines pour identifier les structures ou protéines clés à l’intérieur des cellules observées. L’étiquetage fluorescent est couramment utilisé, mais traditionnellement, il ne permet qu’un nombre limité de couleurs en raison des longueurs d’onde superposées. Cependant, l’équipe de Zhao a développé une approche de lavage et de répétition, qui permet plusieurs cycles d’étiquetage sur un seul échantillon. Cela, combiné à une amélioration de l’agrandissement de l’image, permet la visualisation de multiples interactions de protéines et de structures en 3D.

Le système µMagnify offre une solution économique et simple pour améliorer la puissance et la polyvalence des microscopes confocaux existants. Avec un coût estimé à 10 dollars américains par échantillon, les laboratoires du monde entier peuvent adopter cette technique. Dans les régions aux ressources limitées et à forte prévalence de pathogènes microbiens, telles que l’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud-Est, le système présente un grand potentiel. Les chercheurs ont même développé un programme de réalité virtuelle appelé ExMicroVR pour la visualisation des données, facilitant la recherche collaborative entre plusieurs chercheurs sur le même échantillon.

Source : Yongxin Zhao et al., Advanced Science